Les identités LGBT+ dans la musique populaire

Discrètement ou ouvertement, de nombreuses chansons ont posé leurs mots sur les réalités vécues par les membres de la communauté.

Chansons LGBT+ en France : des murmures aux manifestes

Qu’iels soient membres ou non de la communauté, beaucoup d’artistes ont abordé l’homosexualité et l’identité de genre en chanson, de façon plus ou moins subtile ou bienveillante. Voici un bref historique des cent dernières années en France.

La chanson interlope

Des chanteurs ont abordé le thème de l’homosexualité par le biais de la métaphore, de l’allusion, et parfois de l’humour, pendant toute la première moitié du XXe siècle : on parle de chanson interlope. Dranem (Le Trou de mon Quai, Henri, pourquoi n’aimes-tu pas les femmes ?) ou Suzy Solidor (Ouvre, un texte à l’érotisme féminin à peine caché) sont parmi les pionnier•e•s du genre.

La chanson interlope est d’abord interprétée dans le milieu nocturne, festif et permissif des music-halls, et connait son âge d’or dans l’entre-deux-guerres, où les personnages androgynes (hommes travestis et « garçonnes ») gagnent en popularité sur les scènes.

La seconde guerre mondiale et l’occupation nazie marquent un coup d’arrêt à l’expression libre et audacieuse démarrée dans les années folles.

Le timide après-guerre et les années 1960

Les chansons sur le thème reprennent peu après dans l’après-guerre, avec notamment « Ils en sont tous » de Robert Rocca (1949), décrivant sous un jour joyeux et plutôt amusant une ville imaginaire de province où tous les hommes seraient gays.

1957 voit paraître l’évocateur « Jardin extraordinaire » de Charles Trenet, et « Le tourbillon de la vie« , histoire d’amour avec une femme interprétée par Jeanne Moreau.

« Nous les amoureux » (1961, Jean-Claude Pascal) raconte l’histoire d’amoureux, au genre indéterminé, persécutés par un monde hostile, et « Mon cher Albert » (Jean Yanne, 1964) dépeint de façon tendre et amusante une histoire d’amour entre deux hommes, dont l’un est curé.

Frédéric Botton, l’auteur-compositeur de la Grande Zoa (interprétée par Régine) et les Pingouins (interprétée par Juliette Gréco), marque la fin des années 60 avec une liberté de ton malicieuse.

Du militantisme au mainstream

Les mouvements de mai 1968 en France, demandeurs d’une plus grande liberté sociale et sexuelle, puis ceux de Stonewall à New-York en 1969, font des vagues, et des organisations comme le FHAR (Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire) et les Gouines Rouges voient le jour. 

C’est dans ce contexte qu’en 1972, Charles Aznavour, au sommet de sa popularité, jette un pavé dans la marre avec « Comme ils disent », première chanson à employer sans ambiguïté le terme « homo » dans son texte.

Écrite entre 1976 et 1978, la comédie musicale franco-québecoise Starmania, immense succès populaire et commercial, figure au moins deux personnages queer (et leurs chansons consacrées) : Ziggy, jeune disquaire homosexuel, et Sadia, « travestie » révolutionnaire.

Les années 1980 voient un flot de nouveaux artistes et morceaux aborder le sujet : Mylène Farmer, Etienne Daho, ou encore Indochine font partie de cette vague. Dans un registre plus interlope, Anne Sylvestre écrit notamment « Xavier », l’histoire d’un garçonnet dont le comportement jugé trop féminin provoque la panique de son entourage réactionnaire.

En 1990, le groupe espagnol Mecano rencontre le succès avec « Mujer contra Mujer », qui fera l’objet d’une adaptation française (une femme avec une femme”) et d’une adaptation italienne (“Per Lei contro di Lei”).

Accompagnant des évolutions sociales positives et l’obtention de nouveaux droits (dépénalisation de l’homosexualité, PACS puis mariage pour tous) les thématiques LGBT+ se sont depuis banalisées dans la chanson francophone ces trente dernières années. Avec Hoshi, Eddy de Pretto ou encore Angèle, des artistes ouvertement « out » se posent en modèles clairs et positifs pour les jeunes queer en recherche d’identification.

Finis les sous-entendus, iels expriment de façon libre et claire leur identité et leurs engagements, posant les hymnes et les playlists de leur décennie.

Des hymnes et des icônes

Au fil des décennies, la communauté a plébiscité des artistes pour leur panache, leur look, leur histoire personnelle, ou leurs éventuelles prises de position en faveur de la communauté.  

La qualité mélodique ou dansante, le sens supposé des paroles, ou le clip vidéo d’un morceau peuvent l’élever au statut d’hymne gay ou queer, joué inlassablement dans les clubs ou sur les chars des défilés.

Les hommes gays et les "divas"

De la comédie musicale (Judy Garland, Liza Minelli) à la pop contemporaine (Lady Gaga, Madonna) en passant par le disco (Donna Summer, Diana Ross), les hommes gays ont régulièrement adopté les chants et personnages de femmes fortes et dramatiques, racontant leurs combats contre l’adversité du quotidien et les violences de la masculinité traditionnelle, et portant un esprit de résilience et de fierté qui résonnait tout particulièrement avec leurs combats. 

Si les chanteuses concernées n’avaient pas nécessairement de lien préalable ou conscient avec la communauté, leurs réactions ont été globalement positives, et beaucoup ont pris à cœur de soigner cette frange particulièrement active de leur fan base.

Quelques icônes américaines

Des idoles Made in France